Croisades ? Vous avez dit croisades ?

Publié le 13 Juin 2020

Le mot « croisade » fait spontanément penser, de nombreux siècles après, au déroulement des événements historiques survenus dans la partie orientale de la Méditerranée de 1096 (arrivée des premiers croisés à Constantinople) à 1303 (abandon par les Templiers de l’îlot de Raoud en face de Tartous, actuellement en Syrie). Dans nos mémoires d’occidentaux surgit en effet la représentation d’une épopée justifiée par la foi catholique et qui fut sanglante dans un espace géographique qui va de Tunis à Istanbul.

Un espace qui correspond à ce jour au territoire actuel de la Turquie, de la Syrie, du Liban, d’Israël, de la Jordanie, de l’Egypte, de la Libye et de la Tunisie et qui donne du même coup à cette épopée « complexe » un lien entre les faits d’hier et une actualité  brûlante …  

Après ces événements d'affrontements, il y eut en effet des récits, des explications, mais aussi des interprétations, au mieux des nuances, au pire des controverses sur la version qui a prévalu en Europe occidentale à savoir que la croisade a été celle d’un mouvement à base exclusivement religieuse destiné à s’assurer le contrôle des Lieux Saints de Palestine pour protéger les pèlerins en route vers  les lieux de la vie du Christ. De nouvelles analyses depuis les années 1950 ont élargi la façon de penser et de juger de cette époque autrement qu'en de termes manichéens du côté occidental.

Des points de vues bâtis sur des écrits arabes traduits et déjà disponibles vers 1880 ( mais en diffusion limitée aux milieux érudits) ont dévoilé que l’état d’esprit des croisés au-delà de la conquête par la chrétienté latine n’était pas sans d’autres motivations (désir de gains et de profits marchands, projets de possessions personnelles, aventures guerrières dédouanées a priori du commandement « Tu ne tueras point ! »).

Ces luttes violentes ont dévoilé des chocs entre deux, voire trois mondes : le monde occidental, le monde byzantin, le monde arabo-musulman et manifesté les oppositions entre les trois religions du Livre : juive, chrétienne, musulmane, soit trois religions monothéistes.

Donc, rien d’homogène ni d'absence d’équivoques en cette longue période de l’histoire autour de la Méditerranée, où au XIeme siècle se confrontaient bien des forces inégales et des intentions stratégiques de pouvoir économique, politique et religieux.

Evitons les anachronismes quand nous nous retournons vers ce passé !

Il nous faut ainsi être attentif au vocabulaire usité qui a laissé son empreinte sur l’imaginaire commun. A l’époque on ne parlait pas d’Arabes ni « d’islamistes » mais des Sarrasins : les Byzantins ont appelé ainsi les peuplades d’Arabie puis globalement ceux qui vivaient sous l’autorité du calife (chef temporel et spirituel). De même, on ne parlait pas de croisade mais de pèlerinage : le terme de « croisades » date de 1480 environ. Vers 1080 on trouve le mot « cruisier » (« disposer en croix ») puis croiser, ensuite « se croiser » qui désigne à partir de 1174 le fait de s’engager pour la croisade en revêtant un vêtement portant la croix. Le mot latin peregrini (du latin peregrinus : étranger, voyageur) pendant longtemps s’est appliqué aux croisés ou miles Christi (soldats du Christ).

Pour les chroniqueurs arabes, les Franj sont les croisés et les Roum ou Rûm sont les Byzantins, c’est-à-dire les Romains de l’empire d’Orient. Le mot « islam » (soumission à la volonté de Dieu) ne signifiait rien pour la grande masse de croisés : pour eux, les musulmans étaient purement des païens.  Quant aux  mamelouks, ce sont des esclaves-soldats qui, cantonnés au bord du Nil, ont pris le pouvoir au Caire en 1250 en renversant la dynastie ayyubide et ont conquis la Palestine et la Syrie.

Huit croisades ont eu lieu entre 1095/1096 et 1270
Ces expéditions militaires ont eu une grande répercussion sur la société européenne et elles ont servi entre autres de relais essentiel dans certains domaines pour la transmission aux pays occidentaux de l’héritage gréco-romain.

Sources : Claude Lebédel, LES CROISADES, Editions Ouest-France, Rennes, 2004

Rédigé par Claude Laporte

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